328               MEMOIRES DE PIERRE DE LESTOILE.
bon devoit estre roi, mais on ne lui devoit que le baisemain ; et par ce moien n'eust joui de tant de re­venu qu'il en tiroit de ses benefices. L'entreprise des­couverte fust remise, mais non pas rompue; et M. le cardinal de Bourbon en demeura malade de regret. Lequel le Roi ne laissa d'aller voir; et le piquant au vif par ses gosseries accoustumées, lui dit : a Mon « cousin, prênes bon courage. Il est vrai que vous « n'estes pas encores roi ; mais vous le serez possible « aprés moi. »
En ce mesme mois vinrent nouvelles à Paris de la treufve du Languedoc faite sur M. Du Bouchage, duc de Joieuse, surnommé peu au paravant frere Ange, ca­pussin. Sur laquelle métamorphose, et la treufve faite par lui, furent divulgués à Paris les vers suivants :
De peur des coups, il quitta son espée
Pour prendre un froc, et fist bien la pippée.
Aprés qu'il estaux armes rappelé,
U sent encor son capussin pelé :
Car il fait treufve afin qu'il se repose.
Moine et guerrier, c'est tousjours mesme chose. Voies si Tholozans sont gens bien entendus, Qui, fascbés du harnois et du bat qui les blesse, Nagueres ont choisi, entre moines rendus, Un gentil capussin pour chef de leur noblesse ! Ge n'est pas mauvais choix : car.par ruse et finesse U se tire avec eux du hasard des con^Bp ; Et, laissant à la treufve apointer leursaebats, Prend an crocq le procés du presche et de la messe.
N. R. P. En ce mois, fust fouetté à la porte de Paris ung de ces porteurs de sablon qu'on appeloit vulgairement Gatelinette, pour avoir chassé son asne aux Estats, et s'en estre moqué. Et en mesme temps eust le fouet en chastelet, sous la custode, le serviteur de Baudouin
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